Pouvez-vous vous présenter ?
Je m’appelle Sylvain Mahuzier.
Je suis généralement qualifié de naturaliste voyageur, un vocable qui dans mon cas regroupe plusieurs métiers, bien sûr tous liés à la nature !
Pourquoi vous êtes-vous tourné vers le métier de guide polaire ?
Tout a commencé avec mon grand-père Albert Mahuzier, pionnier de « Connaissance du monde », cette organisation de conférenciers voyageurs qui regroupait des explorateurs-cinéastes comme Paul-Émile Victor, Frison-Roche, Cousteau, Tazieff et d’autres.
Lorsque j’étais adolescent, j’ai eu la chance de participer modestement à un long-métrage que mon aïeul avait intitulé « La grande aventure des oiseaux migrateurs ». C’est comme ça que je suis « tombé dans la marmite » et devenu ornithologue !
Parallèlement, mon grand-père maternel m’avait initié à la photographie et offert mon premier appareil photo reflex… la voie était tracée pour devenir naturaliste et m’exprimer aussi par l’image !
Parlez-nous de votre parcours… Quelles études avez-vous réalisé ?
Études de biologie, enseignement des sciences naturelles en collège, responsabilité importante au sein d’une maison d’édition spécialisée dans les ouvrages sur la nature et les guides de terrain, co-fondation d’un bureau d’études de la faune ainsi que la flore avec des amis naturalistes, autant d’étapes largement liées à la nature.
Entre temps, j’avais décidé de passer une année en Islande, terre qui m’attirait depuis longtemps, afin d’en étudier les oiseaux et les volcans.
J’ai donc proposé à mon retour à différentes agences spécialisées dans les destinations boréales de concevoir et d’organiser des voyages de découverte de la nature dans cette île magnifique, et de fil en aiguille suis devenu guide polaire, conférencier et écrivain, d’abord pendant mes congés, puis une bonne partie de mon temps, que je consacre aujourd’hui pour l’essentiel à Voyages d’exception.
C’est ainsi que tout naturellement (c’est le cas de le dire !), j’ai pu faire de ma passion de la nature mon métier, ou plus exactement « mes métiers » !
Quelles sont selon vous les qualités requises pour être guide polaire ?
Résistance. Cela semble évident, mais pour commencer il faut être capable de supporter n’importe quel climat, y compris lorsqu’il fait un temps à ne pas mettre le nez dehors.
À l’exception des conditions de vent et de glace qui peuvent être dangereuses, la météo ne doit pas être un obstacle, car on se rend vite compte que tous ces grands espaces sont magnifiques par tous les temps, et qu’on aurait vraiment tort de rester enfermés.
En outre, le vent étant plus que fréquent dans les régions polaires, le temps peut changer à une vitesse impressionnante. Un dicton islandais l’exprime fort bien : « Si le temps ne te plaît pas, attends 5 minutes ! ».
Du coup, la lumière est modifiée en permanence et les paysages ne sont plus exactement les mêmes d’un moment à l’autre !
Le métier de guide polaire conduit évidemment à passer davantage de temps à l’extérieur que nos passagers, particulièrement lors des croisières (dont les voyages polaires).
Repérages, allers et retours en zodiac pour conduire tout le monde sur le rivage lorsqu’une excursion est programmée, vérification du site lorsque les passagers sont revenus à bord… cela peut prendre plusieurs heures et lorsqu’on navigue en marge de la banquise ou au milieu des icebergs, il fait frisquet !
Alors il faut prendre sur soi, se rappeler la chance qu’on a d’être là et relever la tête : cela ne ferait pas sérieux pour un guide polaire de claquer des dents lors de la conférence ou du récapitulatif qui suit généralement juste après être revenu (parmi les derniers) à bord !
Curiosité. C’est une autre qualité qu’il n’est généralement pas nécessaire de développer, compte tenu que si on fait ce métier, ce n’est pas pour rester dans son canapé ou sur la plage…
Mais cela mérite d’être mentionné, car un vrai curieux va toujours plus loin, veut toujours découvrir plus : on commence par aller un peu au nord, puis on y prend goût et on s’en va beaucoup plus au nord, puis on a envie d’aller de l’autre côté de la planète, en Patagonie par exemple, et cap sur le grand continent blanc !
Sécurité. Une évidence lorsque l’on a la responsabilité d’un groupe, et patience, tout le monde ne réagit pas de la même façon !
Et j’ai envie de rajouter enthousiasme… c’est un métier de passionné, et une passion cela se transmet dans la bonne humeur, avec de l’optimisme, et une bonne dose de sourires, que ce soit sur le terrain ou lors d’une conférence !
Un conseil pour un voyageur qui réalise une croisière pour la première fois ?
En voici deux, l’un pour le confort, l’autre pour le plaisir…
Bien s’équiper. Le secret est connu maintenant : il faut appliquer la règle des pelures d’oignon ! Des sous-vêtements polaires jusqu’à la parka, et des bottes dans lesquelles on aura pris soin de mettre de vraies bonnes grosses chaussettes, jusqu’aux gants.
Sans oublier d’occulter les ouvertures : rien de tel pour vous refroidir qu’un petit courant d’air dans le cou ou dans le dos, alors écharpe et bonnet de rigueur !
Partir sans à priori : se laisser envahir par la beauté des paysages, savourer les rencontres animales et humaines, garder les yeux grands ouverts en permanence (sauf quand il y a du blizzard…), les oreilles aussi car les guides polaires vous feront partager leurs connaissances.
En un mot retrouver ce sens de l’émerveillement que les vicissitudes du quotidien nous ont souvent fait oublier !
Si vous deviez choisir 3 destinations polaires, lesquelles seraient-elles ?
Islande : une destination presque polaire puisqu’elle est effleurée par le cercle polaire arctique, mais pas tout à fait polaire car c’est une île volcanique au climat océanique relativement tempéré.
Si vous aimez les paysages formidablement contrastés et spectaculaires, les plages de lave noire, les chutes d’eau somptueuses, la mousse vert fluo, les multitudes d’oiseaux… et particulièrement les macareux.
Spitzberg : à mi-chemin entre le Cap Nord en Norvège et le pôle Nord, voilà encore une destination inoubliable !
Entre montagne et mer, entre fjords et glaciers, partir à la rencontre de l’ours polaire ou du morse débonnaire, du renne du Spitzberg ou du renard arctique, et s’extasier devant de gigantesques falaises à oiseaux de mer !
Et pourquoi pas aller flirter avec la banquise par 82 degrés nord ?
Antarctique : on ne peut établir un podium polaire sans y affecter la découverte de la péninsule Antarctique.
C’est le voyage d’une vie, l’accès au bout du monde, les yeux écarquillés en permanence. Tutoyer les icebergs tabulaires et la banquise, observer le comportement extraordinaire des manchots, être soi-même observé par des phoques étonnants et participer au ballet des baleines, waouh !
Envie d'en apprendre plus ? Découvrez les nombreux ouvrages auxquels Sylvain Mahuzier a participé.